Il y a des livres qu’on croit connaître avant même de les ouvrir. La Peste d’Albert Camus en fait partie. J’en avais des images floues : une ville fermée, une épidémie, un médecin stoïque. En réalité, j’ai découvert un roman bien plus inattendu que prévu. Une histoire d’hommes seuls face à l’absurde. Un récit sans pathos, où l’émotion est venue de moi-même.

Sommaire
Comment débute le livre ?
Le narrateur commence par décrire Oran dans les années 1940, une ville tout à fait moderne, qui serait insignifiante s’il n’y avait l’excès du climat, l’importance des affaires et la qualité des plaisirs ; tout cela requérant une bonne santé.
Justement, à propos de santé, le docteur Rieux trouve un rat mort au milieu de son palier. Il n’y prête pas attention, mais les rats morts ont l’air de sortir un peu de partout. Des rats ? Personne n’anticipe, et il faudra longtemps aux médecins pour diagnostiquer la maladie qui touche maintenant les hommes.
Qu’en ai-je pensé ?
Peste et nazisme
Alors oui, la métaphore entre la peste (maladie) et la peste brune (nazisme) est évidente, mais elle est très légère. En effet, la peste est aveugle, les nazis ne l’étaient pas. La peste est toute puissante, et ce n’est qu’à la fin, que le sérum du Dr Castel devient efficace, les nazis, eux, ont rencontré la Résistance intérieure et des armées redoutables. Et si ce livre résonne encore, c’est parce qu’il nous raconte aussi une histoire qui a été la nôtre.
Peste et Covid 19
La Peste a rencontré une résonance particulière pendant la pandémie du début des années 2020, et on peut comprendre pourquoi. En effet, on retrouve la même incertitude concernant l’avenir — quand tout cela prendra-t-il fin ? — et le nombre de morts égrené quotidiennement.
Mais les différences existent aussi : les habitants étaient confinés, certes, mais à l’intérieur de la ville, pas reclus chez eux comme nous l’étions. Ils se retrouvaient donc sans difficultés et pouvaient bénéficier de relations sociales, ce qui nous a tellement manqué !
À l’inverse, pas de moyens de communication entre Oran et l’extérieur, impossible de savoir si la personne qu’on aime va bien ou non. Et Albert Camus a introduit quelque chose de plus personnel, l’exil et la séparation avec l’être aimé ; ce qui m’a émue.
La séparation avec les êtres aimés
Je n’ai pas pu m’empêcher de faire le lien avec le lieu et le moment où il a écrit ce roman. En effet, il a commencé à le rédiger en 1942 à Pannelier (Haute-Loire) alors qu’il était venu soigner sa tuberculose pour quatre mois. Il y est arrivé en août avec sa femme, mais elle a dû repartir à Alger. Au mois de novembre, les Allemands envahissaient la zone libre et il n’a pu retourner chez lui qu’en novembre 1943. Il est donc resté plus d’un an, loin de l’être aimé, dans un pays très différent de son Algérie natale (Camus chez les Justes).
Le narrateur ne recherche pas l’émotion
Vous ne saurez qu’à la fin du livre qui il est et pourquoi il a gardé le secret jusque-là :
« D’une façon générale, il s’est appliqué à ne pas rapporter plus de choses qu’il n’en a pu voir, à ne pas prêter à ses compagnons de peste des pensées qu’en somme ils n’étaient pas forcés de former, et à utiliser seulement les textes que le hasard ou le malheur lui avaient mis entre les mains ».
Des scènes sont néanmoins dures, vous vous en doutez.
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Quels sont les thèmes ?
- Maladie
- Métaphore du nazisme
- Enfermement
- Séparation
Qui sont les personnages ?
Les femmes
Curieusement, les femmes sont absentes du livre. Les personnages principaux sont célibataires, soit depuis longtemps, soit parce qu’ils sont séparés de leurs épouses à cause de la fermeture de la ville. J’ai trouvé que cela donnait au roman une atmosphère de solitude masculine.
Serait-ce parce que Camus pensait qu’elles ne pouvaient pas avoir de rôles dans les évènements ? Je ne le crois pas. En effet, Dora est un personnage essentiel de sa pièce de théâtre Les Justes. J’imagine donc plutôt que c’est leur absence qui dit quelque chose. Elles ne sont pas là, et pourtant, elles pèsent.
Bernard Rieux
Jeune médecin de 35 ans, il est marié, mais sa femme est partie se soigner juste avant le commencement de l’épidémie. Les autres personnages se rapprochent de lui, peut-être parce qu’il en sait — un tout petit peu — plus.
Jean Tarrou
Un peu mystérieux, il tient cependant un journal qui est utilisé par le narrateur.
Le père Paneloux
Un prêtre qui a l’habitude de fustiger son auditoire. Selon moi, il a une interprétation extrême de la peste. En effet, il essaie de trouver un sens à l’absurde.
Joseph Grand
Employé apparemment insignifiant, il essaie d’écrire un livre, mais ne va pas au-delà de la première phrase dont il n’est jamais satisfait. Rieux — et moi aussi — le voit comme un héros du quotidien.
Cottard
Dans les temps troublés, il y a des profiteurs. Dans ce roman, c’est Cottard.
Comment est-ce écrit ?
Incipit :
« Les curieux évènements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194. à Oran. De l’avis général, ils n’y étaient pas à leur place, sortant un peu de l’ordinaire. »
Sortant un peu de l’ordinaire ? Vous comprenez ce que je veux dire quand j’écris que le narrateur ne cherche pas l’émotion ?
Citation :
« On ne peut pas dire : “cela, je le comprends ; mais ceci est inacceptable”, il fallait sauter au cœur de cet inacceptable qui nous était offert, justement pour que nous fissions notre choix. La souffrance des enfants était notre pain amer, mais, sans ce pain, notre âme périrait de sa faim spirituelle. »
Le père Paneloux
Mon avis en résumé
Ce que j’ai aimé
- Un texte intemporel
- Un texte riche par ses thèmes
Mes notes
Difficile de noter un texte pareil sans être ridicule. Alors 5/5 ?
Lecture un peu exigeante
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Info-livre : La peste par Albert Camus

Éditeur : Folio
ISBN : 2-07-036042-3
Pages : 279
Date de parution : 27/02/2000
(initialement paru en 1957)

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