J’ai un point commun avec Nelly Alard : tous les livres sur Elizabeth d’Autriche qu’elle cite, ou presque, sont dans ma bibliothèque, même si je n’ai pas lu le dernier livre entré sur mes étagères. Pas question alors de rater La vie que tu t’étais imaginée.
J’ai acheté Elizabeth Impératrice d’Autriche L’hérédité sinistre des Wittelsbach, une biographie de Maurice Paléologue parue en 1939, pour deux euros dans une librairie solidaire. Pour le plaisir de l’avoir dans ma bibliothèque.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’un livre sur Sissi, mais plutôt d’une enquête sur sa fille supposée, il est nécessaire de s’intéresser d’abord à la femme qui a ensorcelé l’auteur.
Au sommaire de cet article
Elizabeth d’Autriche, une femme qui fascine
Une des plus belles femmes de son époque
Grande, très mince, avec un tour de taille de cinquante-et-un centimètres, une chevelure sur laquelle son fils Rodolphe pouvait marcher comme sur un tapis, elle a passé sa vie à entretenir sa beauté.
Une histoire qui commence comme un conte de fées
Née en 1837, Elizabeth de Wittelsbach est la quatrième enfant des dix enfants de Ludovica et Maximilien, duc en Bavière. Elle est élevée sans contraintes, à l’écart de la cour bavaroise.
Sa sœur Hélène va se fiancer avec l’empereur d’Autriche, François-Joseph. Leur mère, Ludovica décide d’emmener Elizabeth.
François-Joseph tombe amoureux de Sissi, convainc sa redoutable mère, l’archiduchesse Sophie (sœur de Ludovica) de le laisser épouser Elizabeth. Une princesse de Bavière à la place d’une autre, aucun problème, du moins pour les mères des jeunes gens. Il n’est pas certain qu’Elizabeth ait été aussi enthousiaste. Mais :
“On ne refuse pas l’empereur d’Autriche”
Sissi épouse alors son cousin germain, elle n’a que seize ans.
Le conte de fées s’arrête là. Devenue impératrice, Elizabeth doit se plier au rigide protocole de la cour autrichienne. Elle devient vite impopulaire.
Des drames jalonnent sa vie.
Une histoire politique aussi
Sissi tombe amoureuse de la Hongrie (mais se moque éperdument de toutes les autres nations alors sous le joug de l’Autriche). Elle joue un rôle non négligeable dans le compromis austro-hongrois qui établit la double monarchie. Elle est couronnée reine de Hongrie aux côtés de François-Joseph en 1867.
Une histoire qui finit en drame
Elle est assassinée en 1898 à Genève par un anarchiste qui s’est rabattu sur elle faute de ne pouvoir atteindre le duc d’Orléans
Et en légende
Sa beauté, ses voyages incessants, ses aptitudes équestres exceptionnelles, ses poèmes qui, comme elle l’a souhaité, n’ont été publiés que cent ans après sa mort et les droits d’auteur reversés au HCR en ont fait une icône.
Nelly Alard est interpelée par une note en bas de page
Elizabeth aurait accouché d’une fille cachée, à Sassetôt le Mauconduit en 1882. En 1914, la comtesse Karoline Zenardi Landi publie un livre “The secret of an empress”. Elle y affirme être cette enfant, ce que confirme Marie Larisch, la très controversée nièce de l’impératrice.
Les historiens sont tous d’accord : cette enfant n’a jamais existé, mais Nelly Alard ne se contente pas de ses affirmations. Et si c’était vrai ? Certaines coïncidences sont troublantes, Elissa, la fille de Karoline ne ressemble-t-elle pas à Elizabeth.
Comme pour attiser encore plus la curiosité de Nelly Alard, elle-même actrice, la fille de Karoline, Elizabeth Künehlt, est devenue vedette de cinéma à Hollywood sous le nom d’Elissa Landi. Son étoile sur le Walk of Fame se situe 1611 Vine Street.
Le cinéma, l’autre passion de Nelly Alard.
Une enquête qui a duré trente ans
Nelly Alard a fait d’autres choses pendant ces années. Elle raconte dans La vie que tu t’étais imaginée son enquête (ou son obsession ?) en même temps que sa propre quête vers le succès au cinéma, ses espoirs, ses rencontres, ses déceptions, les films qu’elle va tourner – peut-être, les répétitions de pièces de théâtre.
Et dans le même temps, la voilà à Budapest en train de consulter le journal d’une des dames d’honneur de l’impératrice, la comtesse Festetics. Le manuscrit est rédigé en écriture gothique. Qu’à cela ne tienne, l’auteur trouvera une retraitée autrichienne qui acceptera de le traduire.
Dans une interview sur Lettres capitales, elle explique :
“Le jeu de miroir entre Elissa Landi et la narratrice (c’est-à-dire moi) est au cœur du projet de ce livre : le récit de ma carrière d’actrice ratée prépare celui, triomphant, des premières années d’Elissa Landi à Hollywood – mais tous deux se terminent par la même désillusion, et la réalisation qu’écrire des romans est beaucoup plus épanouissant, et essentiel, que jouer la comédie…”
Trois générations de femme
Karoline était-elle une aventurière ? Nelly Alard ne trouve rien pour confirmer cette hypothèse. Elle en imagine d’autres. Après tout, il y a plusieurs fictions possibles.
L’auteur consacre la deuxième partie de La vie que tu t’étais imaginée à le fille de Karoline, Elissa Landi, une partie moins réussie à mon sens. J’aurais aimé que l’auteur nous entraîne dans l’intériorité de la petite fille cachée d’une impératrice. La version d’Elissa Landi, vu par Nelly Alard, est celle d’une femme plutôt froide, prête à tout pour sa carrière.
Elle rencontre Caroline, la fille d’Elissa Landi
Le style
Incipit :
Hollywood, USA, 1932
“Un matin de printemps et le jour qui se lève sur l’immensité de la ville, les milliers de maisons alignées, la perpendicularité inexorable des avenues, là où vingt ans plus tôt s’étendaient les champs d’oranger, de citronniers et les pâturages, vingt ans plus tôt à peine, lorsque Griffith, De Mille et les autres décidèrent de planter leur caméra ici, sous le soleil de plomb californien, précisément ici, quelque part vers le croisement de Vermont et de Sunset.”
Citation :
“Si Karoline était mythomane, elle avait manifestement réussi à embarquer dans son délire sa famille toute entière.”
Mon avis en résumé
Ce que j’ai aimé
- L’auteur entretient le mystère, difficile de ne pas penser que peut-être…
- L’enquête racontée en parallèle de la vie de Nelly Alard
- L’empathie de l’auteur envers Caroline, la fille d’Elissa.
Ce qui m’a agacée (mais peut-être pas vous)
- Le peu d’intérêt du personnage d’Elissa.
- Le peu d’information sur Elizabeth d’Autriche
Lecture un peu exigeante
Mes notes
Thème de l’histoire | 5,0/5 |
Structure | 5,0/5 |
Partie I | 5,0/5 |
Partie 2 | 2,0/5 |
Style | 5,0/5 |
Moyenne | 4,4/5 |
Pour aller plus loin
J’ai beaucoup aimé ce livre avec le jeu de miroir entre Elissa Landi et la narratrice. Sa structure complexe est parfaitement maîtrisée et le sujet m’a séduite. En aurait-il été de même si je n’avais pas lu les mêmes livres que l’auteur ? Je n’en suis pas certaine.
Si vous voulez lire des livres sur Sissi, qui ne sont ni des romans ni des répétitions d’autres livres, voici les deux livres à lire :
Elizabeth d’Autriche Egon Caesar Corti (1936).
Cette biographie d’un auteur sous le charme de son sujet est rééditée régulièrement.
Élisabeth d’Autriche de Brigitte Hamann (1982).
Une biographie d’un auteur pas du tout tombé sous le charme cette fois-ci, qui démystifie le personnage.
Et pour vous faire une idée sur ses poèmes :
Le Journal poétique de Sissi, poésie d’Élisabeth, impératrice d’Autriche.
L’histoire du livre est un roman à lui tout seul, il a été publié aux Editions du félin.
À vous maintenant
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Des vies que l’on imagine
Vie rêvée
Héla Saïdi
La vraie vie
Adeline Dieudonné
Info-livre : La vie que tu t’étais imaginée par Nelly Alard
Editeur : Gallimard
ISBN : 978-2-07-285380-7
Pages : 456
Date de parution : 03/01/2020
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Bonjour,
Intéressant la façon dont vous parlez de ce livre, l’histoire mais aussi tout ce qui touche à sa construction, votre critique…
Je suis encore en pleine lecture et découverte de ce roman que je trouve captivant, avec une très belle écriture et ce fameux jeu de miroir entre Elissa et l’écrivaine qui rend la narration encore plus enrichissante, je trouve.
Merci…
Daniel C.
J’ai adoré la première partie de ce livre, effectivement le jeu de miroir.