La chronique d’Il n’y a pas de Ajar a été difficile à rédiger sans doute parce que ce texte de Delphine Horvilleur n’a pas été écrit pour être lu, mais pour être déclamé devant des spectateurs. Il aborde cependant des questions, des pistes de réflexion sur un sujet qui hante même nos auteurs (et leurs lecteurs) : l’identité.
Service Presse
L’identité se rétrécit
Delphine Horvilleur combat l’idée que l’identité est unique, bien au contraire nous en avons plusieurs. C’est du bon sens, mais… Il est vrai qu’on présente de plus en plus les gens avec une identité, avec comme conséquence :
« … tu ne joues plus que dans une seule catégorie et tu es donc sans rapport avec qui que ce soit d’autre. Bien sûr, ça oblige à un certain niveau d’entre-soi pour préserver la pureté de l’édifice. »
Pire encore, des voix s’élèvent pour dire qu’on ne peut pas comprendre le racisme sans être noir, l’antisémitisme sans être juif ou le féminisme sans être femme.
Romain Gary n’avait jamais entendu parler de l’appropriation culturelle lui qui s’est mis dans les chaussures d’une vieille femme juive, ancienne prostituée et rescapée des camps
Et ce n’est pas tout
La 291e d’Apostrophes
« Pivot t’annonce en bégayant que Romain Gary, LE Romain Gary que personne n’est foutu de mettre dans une case : Résistant, fils à maman, diplomate, star-fucker, aviateur, réalisateur, romancier génial ou pitoyable, prix Goncourt 1956, s’est fait, tout seul, un suicide collectif. »
Vous vous en souvenez ? Moi oui, j’avais été bouleversée par cette émission portant sur une des plus grandes mystifications littéraires du XXe siècle. Romain Gary s’est créé une nouvelle identité. Il remporte un second prix Goncourt (La vie devant soi, 1975).
Grâce à L’Ina, vous pouvez réécouter la présentation de l’émission (toute l’émission si le cœur vous en dit) sur Youtube.
Qui mieux que le fils de l’inexistant Émile Ajar, Abraham pour nous parler d’identité ?
Un texte écrit pour être joué
Il y a beaucoup d’humour dans ce texte et je regrette de ne pas avoir eu l’occasion de l’entendre. Il faut imaginer les intonations, ce qu’un acteur aurait pu y injecter pour retrouver toute la saveur de cet écrit.
Abraham Ajar raconte l’histoire d’un jeune garçon qui n’avait pas dit un seul mot jusqu’à l’âge de douze ans. Ce jour-là, à table, il se tourne vers son père et lui demande de lui passer le sel. La famille, folle de joie, lui demande alors pourquoi il n’avait jamais parlé. Réponse : « — Ben, jusqu’ici, tout allait bien ».
« Je crois que c’est la pire chose qui puisse arriver dans l’existence : ne manquer ni de sel, ni de tendresse, ni d’amour… parce qu’alors il n’y a aucune raison de se mettre à parler, à écrire ou à créer. Si t’es complètement, immanquablement toi-même, alors y’a rien à dire.
C’est le mutisme de la plénitude. »
Mon avis en résumé
Sans doute parce que le texte a été écrit pour être joué, Il n’y a pas de Ajar est plus ardu à lire que Vivre avec nos morts. Il interroge le sens que notre société donne au mot identité, non sans évoquer la difficulté de définir l’identité juive.
Mes notes
Comme d’autres livres de Delphine Horvilleur, ce livre mérite d’être lu.
Note : 4/5
Lecture exigeante
À vous maintenant
Vous l’avez lu ? Donnez-moi votre avis en commentaires. Pensez à activer la cloche qui se situe avant le bouton Publier le commentaire pour recevoir un mail avec les réponses à votre commentaire.
Acheter d’occasion
Ce livre vous tente ? Achetez-le d’occasion grâce au lien ci-dessous. Lien affilié, c’est-à-dire que si vous achetez après avoir cliqué sur ce lien, je toucherai une commission (sans coûts supplémentaires pour vous).
Identité et littérature
Quand tu écouteras cette chanson
Lola Lafon
Trilogie new-yorkaise
Paul Auster
Info-livre : Il n’y a pas de Ajar par Delphine Horvilleur
Editeur : Grasset
ISBN : 978-2-246-83156-3
Pages : 88
Date de parution : 14/09/2022
Restons en contact
Inscrivez-vous à la newsletter