Faut-il vivre sa vie ou la rêver ?
L’auteur part d’une situation particulière, une jeune femme musulmane homosexuelle, pour en faire une histoire aux thèmes universels : femme et religion, amours contrariées et désirs d’enfant. Un coup de cœur pour cette capacité d’Héla Saïdi de parler, dans Vie rêvée, de ce qui nous rassemble plutôt que de ce qui nous sépare .
Service Presse
L’intrigue
La narratrice a été élevée dans une famille tunisienne venue vivre en France. Pieuse, elle s’interroge sur la place de la femme dans sa religion et analyse les textes fondateurs sur cette question. Son attirance pour les femmes ajoute à son désarroi. Malgré de brillantes études, sa confiance en elle est au minimum et elle peine à trouver sa place.
Elle tombe amoureuse de Stéphanie…
L’auteur fait parfois de digressions assez longues. Si j’ai adoré ses recherches sur la situation de la femme dans les textes fondateurs de la religion musulmane, je n’ai pas compris l’intérêt de nous parler de la vie de Soliman (ou Suleyman) le Magnifique m’a passablement ennuyée (à moins que je n’aie raté quelque chose).
Quand j’en ai fait part à l’auteur, sa réponse a été révélatrice de ce que vous trouverez dans Vie rêvée :
« Pour Soleymane le Magnifique, là aussi, revenir sur ce personnage historique dans la seconde partie fait écho à la première partie du roman :
– L’importance de l’apprentissage/école dans l’éducation d’un enfant (vs l’importance de l’école à l’époque de Bourguiba, jeunesse de la mère et de l’héroïne traitée dans la première partie du roman)
– La polygamie vs son amour pour une seule femme (la polygamie dans l’islam traitée dans la première partie du roman)
– Sa tolérance pour les autres peuples (juifs)
– La résolution pacifique des conflits (vs le terrorisme islamique abordé dans la première partie du roman)
– Qu’est-ce qu’être un homme musulman bon ? (vs Mohamed), musulman Soleymane buvait et pouvait s’arranger avec la religion…
Bref, Soleymane le Magnifique permettait d’enrichir le chapitre consacré à ce que pouvait souhaiter l’héroïne à son futur enfant : encourager la curiosité pour que son enfant puisse accepter l’autre aussi différent soit-il, le respect comme base solide du “vivre ensemble”. »
L’univers narratif
L’univers narratif est peu décrit, l’auteur se concentre plutôt sur les personnages.
Les personnages
Les parents de la narratrice
#Leila
Pieuse et généreuse, elle se sacrifie pour que son entourage ne manque de rien. C’est grâce à elle que sa fille a pu poursuivre de longues études, elle lui voue une admiration et une reconnaissance sans borne. Le manque d’ouverture d’esprit de Leila ainsi que son obstination à marier sa fille désole néanmoins cette dernière.
#Mohamed
Le père de la narratrice est rempli de contradictions, parfois père attentif et protecteur, parfois, chef de famille qui n’hésite pas à frapper et toujours, un homme qui trouve normal de faire travailler sa femme.
J’ai eu l’impression que l’auteur s’était de même inspiré de deux hommes pour construire le personnage de Mohamed et j’aurais aimé qu’elle aille plus loin dans le personnage de Leila.
L’écriture
L’écriture de Vie rêvée est impeccable.
Incipit :
« Un bar à l’ambiance survoltée. Mes yeux sont éblouis par la lumière stroboscopique des spots colorés. Des visages flous défilent devant moi, lentement, presque au ralenti. Le rythme s’accélère, devient effréné. Le son de la musique électro-pop envahit mes oreilles, m’assourdissant jusqu’à l’étourdissement. Instinct de survie activé. Mon esprit évalue la situation. Je garde les yeux clos. Concentrée sur les battements de mon cœur, je calme cet éclatement intérieur. Petit à petit, mon rythme cardiaque ralentit. J’ouvre les yeux. Un visage familier apparaît. Ma respiration se coupe. Mes yeux se referment. Des mots doux glissent à mon oreille. »
Citation :
« À ma grande surprise, le Coran indique sans aucune ambiguïté que la femme n’est nullement considérée comme un corps second ni comme une servante, allant même jusqu’à insister sur une certaine égalité entre l’homme et la femme. L’homme et la femme semblent jouir de la même dignité humaine et assumer les mêmes devoirs. Encore faut-il avoir une lecture éclairée et contextualisée du Coran en se rappelant qu’à l’époque de la révélation, les femmes ne jouissaient d’aucun droit et que le Coran leur avait permis d’accéder à une vie digne au sens large du terme. Ainsi, pour de nombreuses féministes musulmanes, “ce n’est pas l’islam qui opprime les femmes, c’est la lecture machiste qui en est faite”. Selon que la lecture du Coran soit faite de manière “masculine” ou “féminine”, certains vont finalement y retrouver une égalité entre les hommes et les femmes. »
Mon avis en résumé
Faut-il vivre sa vie, quitte à essayer de la changer (La vraie vie d’Adeline Dieudonné) ou la rêver ?
Ce que j’ai aimé
- Des histoires universelles au travers d’une situation particulière
- Un personnage attachant
- Un style impeccable
Ce que j’ai regretté (mais peut-être pas vous)
- Des digressions (que j’ai trouvées pour ma part passionnantes)
Un de mes sept livres autoédités préférés
Mes notes
Univers narratif | 4,0/5 |
Personnages | 4,5/5 |
Intrigue | 5,0/5 |
Écriture | 5,0/5 |
Moyenne | 4,6/5 |
Lecture assez facile
D’autres avis que le mien
Merci à eux d’avoir joué le jeu des lectures communes.
C’est tout à son honneur et c’est méritoire de s’attacher ainsi à traiter de la façon la plus claire possible ce chapitre difficile, ingrat de la condition féminine SOUS une domination trop présente encore, fort bien illustré dans son roman tout autant attachant que convaincant.
De sorte qu’en le refermant l’on prend le temps d’y réfléchir comme on le doit ou le devrait, c’est à dire posément.
Dur est le chemin. Mais l’essentiel étant de s’y préparer, ce que Vie rêvée aura déjà parfaitement intégré et anticipé
Une analyse intelligente et documentée de l’évolution de l’Islam dramatique pour les femmes. Que ce livre ait été écrit par une femme musulmane donne tout son poids au propos.
Les dernières lignes expliquent le titre du livre « Vie rêvée, faut-il vivre sa vie ou la rêver ? ».
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Pour son premier roman, Héla Saïdi démontre un talent de narration évident. Son style léger animé par une écriture déliée m’a menée par le bout du nez. Le sujet était pourtant « casse-gueule » : une femme musulmane et homosexuelle issue de l’immigration post indépendance Tunisienne, fallait oser ! Et pourtant, c’est réussi.
À mes yeux, la force de ce roman réside dans ce premier temps d’apprentissage que nous donne l’auteure de l’islam. Puis, dans cette histoire d’amour avec Stéphanie. On reste tout du long dans la pureté du sentiment, qu’il s’agisse de foi ou d’amour, jamais l’auteure ne tombe dans le trivial.Vie Rêvée est le reflet de son époque par l’entremise des sujets sociétaux qu’il aborde. Avec son talent de conteuse, Héla Saïdi parvient à porter à un large public des thèmes dont il est temps de parler !
À vous maintenant
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Info-livre : Vie rêvée par Héla Saïdi
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Pages : 278
Date de parution : 05/03/2021
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