Nul doute que Kochan, un garçon frêle et chétif, renvoie à Yukio Mishima lui-même. Il a écrit ce livre à 24 ans. Il en a fallu du courage pour laisser tomber le masque et publier Confessions d’un masque dans le Japon conformiste de l’après-guerre qui rejette l’homosexualité.
L’auteur l’explique dans le préambule intitulé Paroles de l’auteur :
« Ce roman, Ma Vita Sexualis, est une autobiographie sexuelle qui vise à la plus grande précision possible. La première partie est consacrée, à travers ma propre analyse, à une étude du sadisme et de la perversion, la deuxième partie, la seconde s’applique à relater une confession amoureuse dans le style de l’étrange Armance (plus étrange encore qu’Armance), et les remords ardents et éternels qui en découlent. »
Au sommaire
Quels sont les thèmes ?
- Homosexualité
- Rejet
- Différence
Il s’agit surtout du récit de tous les efforts d’un jeune garçon pour devenir normal, quitte à s’aveugler lui-même.
La conscience de son homosexualité.
Très tôt, Kochan comprend qu’il est différent. Dans la rue, ses yeux se portent sur de jeunes militaires ou des ouvriers, souvent de jeunes hommes bien bâtis. Est-ce cela la perversion ? En 1949 au Japon, probablement.
Des fantasmes sanglants
Pour jouir, Kochan rêve, mais imaginer les corps nus de garçons ne lui suffit pas. Il est fasciné par un tableau représentant le martyr de Saint Sébastien et en tire des fantasmes. D’autres rêveries sont inspirées de Quo Vadis. Des passages dérangeants. Sadisme, certainement.
Comment ne pas rapprocher ces fantasmes de la mort cruelle de Yukio Mishima (il s’est suicidé par seppuku1)
Les efforts pour être comme tout le monde
Kochan va jusqu’à tomber amoureux, mais d’un amour suscité par la beauté de Sonoko qui n’entraîne chez lui aucun désir. Il lui faudra se rendre à l’évidence : embrasser Sonoko n’engendre rien.
Un garçon hors de la vie
Dès les premières pages, par le classicisme de l’écriture et par l’impression que Kochan vivait « ailleurs », dans ses rêves, j’ai pensé à Fritz Zorn (Mars). Lui aussi, mais pour des raisons différentes, n’est jamais parvenu à pénétrer la vie. Kochan s’est construit un masque pour essayer d’être normal, Fritz Zorn n’a jamais vraiment essayé.
Un livre qui aurait pu continuer
Confessions d’un masque se termine de façon abrupte et ne laisse pas le choix : il faut lire d’autres œuvres.
Une écriture extraordinaire
Il m’est arrivé de relire des paragraphes pour le plaisir des phrases
Citations :
« Des vagues à la rondeur d’un vert inquiétant venaient du large en glissant à la surface de l’eau. Les groupes de rocs bas qui faisaient saillie dans la mer avaient beau contrer leur avancée en projetant très haut des bouquets d’écume pareils à des mains blanches réclamant de l’aide, ils baignaient dans une sensation de profonde surabondance, et semblaient même rêver de bouées qui auraient rompu leurs amarres. »
« On peut bien écouter le cours, rien n’y fait. On n’a plus alors le choix qu’entre deux voies. La première, c’est de mal tourner, la seconde, d’affecter désespérément de tout savoir. La décision de s’engager dans l’une ou l’autre dépend de la somme de faiblesse ou de courage dont on dispose. »
Cette dernière citation m’a frappée, encore un masque.
Mon avis en résumé
Ce que j’ai aimé :
- L’écriture somptueuse
- Le courage de l’auteur
Ce que j’ai regretté (mais peut-être pas vous) :
- Des fantasmes dérangeants
Mes notes
Je ne suis pas certaine que vous apprécierez ce livre. À la question faut-il le lire ? Je répondrais oui, ne serait-ce que pour cette somptueuse écriture. Conclusion : 5/5
Lecture exigeante
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Info-livre : Confessions d’un masque par Yukio Mishima
Editeur : Folio
ISBN : 978-2-07-288379-8
Pages : 290
Date de parution : 05/11/2020
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- Suicide par éventration ↩︎