Si le contenu d’un livre vous indiffère pourvu que le style soit bon, vous aimerez Le Premier Exil, mais, si le contenu du livre a quelque importance pour vous, épargnez-vous cette lecture, bien loin de l’excellent Le ghetto intérieur, du même auteur, Santiago H. Amigorena.
L’intrigue
L’Argentine étant devenue trop dangereuse, la famille s’exile en Uruguay, pays où il fait bon vivre, jusqu’au début des années 1970 où les militaires prennent le pouvoir et instaurent une dictature. Les Escadrons de la mort proches de l’armée commettent attentats et assassinats.
Cela paraît intéressant. Hélas ! L’auteur ne s’adresse pas aux lecteurs, mais à lui-même. Après m’être ennuyé jusqu’à la page 64, je suis tombée sur ce passage :
« Certains trouveront mon destin digne de mes mémoires — ce n’est pas pour eux que j’écris. Certains trouveront sans doute qu’avoir grandi dans les rues de Montevideo avant de fouler tous les Champs Élysées d’Europe mérite d’être couché sur quelques pages — ce n’est pas pour eux que j’écris. Certains sans doute qu’être arrivé à Paris nu-pieds, qu’avoir été l’enfant le plus pauvre et le plus méprisé du parc Monceau avant d’y faire grandir mes propres enfants comme de petits princes (ou de petits Marcel) est digne d’être narré — ce n’est pas pour eux que j’écris. Comme vous le savez ô, mes lecteurs supposés ! Mes pages sont destinées, comme toutes les pages, mais avec un acharnement supplémentaire, à notre commun oubli. J’écris pour moi-même et pour mes amis. »
Bien, il n’y a aucun mal à écrire pour soi-même et pour ses amis, mais pourquoi publier le livre (20 € quand même) — intitulé roman — et à quoi pense l’éditeur ? Peut-être à 20 €.
Santiago H. Amigorena enfonce le clou, après un passage dédaigneux sur la littérature populaire (genre de position qui m’énerve sérieux) :
« Préservé de la honte du succès, comme disait mon ami Hugo, j’ai toujours vu d’un œil un peu réprobateur les efforts des écrivains en vogue pour s’éloigner des grandes œuvres du passé et s’approcher de leur lecteur contemporain. »
Il n’y a pas de mal non plus à écrire pour le lecteur et à les toucher. Pourquoi ce mépris ?
D’ailleurs, l’auteur n’a pas toujours été préservé de la honte du succès (Le ghetto intérieur), mais si cela devait se reproduire, je ne participerai pas, trop agacé par la posture de Santiago H. Amigorena.
Le sous-genre
Oui, mais à part ça ?
Je dois reconnaître que Santiago H. Amigorena a du talent, j’avais beaucoup aimé Le ghetto intérieur (peut-être parce qu’il s’intéressait à quelqu’un d’autre que son importante personne). J’ai retrouvé ce talent dans certaines pages du livre Le premier Exil malheureusement, elles sont beaucoup trop rares.
Il reste un livre autocentré, sans grand intérêt, effectivement, pour un lecteur qui ne fait pas partie de ses amis.
Le style
L’écriture est magnifique et il peut que cela suffise à emporter votre adhésion, ce n’a pas été mon cas.
Incipit :
« Trois mois après notre installation à Montevideo, nous sommes retournés à Buenos Aires pour quelques jours. El abuelo Zeide, mon arrière-grand-père maternel, avait appelé lui-même ma mère pour la prévenir qu’il allait mourir. »
Mon avis en résumé
Ce que vous aimerez :
- Le style de l’auteur
Ce que vous regretterez (ou pas) :
- Un contenu sans intérêt
Mes notes
Univers narratif | 2,0/5 |
Personnages | 2,0/5 |
Intrigue | 0,0/5 |
Style | 5,0/5 |
Moyenne | 1,8/5 |
Lecture exigeante
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Info-livre : Le Premier Exil par Santiago H. Amigorena
Editeur : P.O.L
ISBN : 978-2-8180-5359-1
Pages : 336
Date de parution : 19/08/2021
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