Comment un être humain peut-il se détester à ce point ? Au point de haïr tous ceux qui lui ressemblent et de passer à côté de sa vie ? Seul un immense écrivain peut arriver à rendre crédible une sombre histoire où le nœud de vipères n’est autre que le cœur de Louis, un vieillard malade.
L’intrigue
Louis commence une lettre à sa femme, Isa. Il y explique qu’après sa mort, elle pourra se précipiter vers le coffre et vérifier la présence des titres, et oui, ils y seront. Il continue en exprimant toutes ses rancœurs envers elle et ses propres enfants.
Je vous vois venir, ça ne vous donne pas envie de le lire, mais c’est sans compter le talent de l’écrivain. Le narrateur vous prend par la main et ne vous lâche plus. Vous aimeriez comprendre, connaître la suite, le dénouement qui n’arrivera qu’après plusieurs rebondissements.
L’univers narratif
Une grande propriété bordelaise, Calèse. Louis, malade du cœur, va du lit au fauteuil et ressasse ses rancœurs.
Les personnages
#Louis
Ancien avocat issu d’un milieu modeste, il est riche, très riche, résultat d’années d’avarice. Il en est persuadé, sa femme et ses enfants le détestent et n’ont qu’une idée en tête, s’emparer de sa fortune. De la fenêtre de sa chambre, il les entend parler et ce n’est ni tendre ni joyeux.
#Isa
Isa est décrite par Louis, une Fondaudège, une jeune fille qu’il n’aurait jamais rêvé d’épouser. Certes, les promesses d’avenir d’un brillant avocat y sont pour quelque chose, mais il va apprendre lors d’une conversation nocturne avec Isa, qu’à cause de la rupture de précédentes fiançailles, elle était considérée comme immariable. Pour un homme qui se déteste autant que Louis, c’est une évidence : elle ne l’a jamais aimé, elle l’a choisi uniquement parce que personne d’autre ne voulait d’elle. C’est la version de Louis.
#Les enfants
Louis et Isa ont eu deux filles et un garçon. Marie, la seule que Louis ait aimée, est morte alors qu’elle était encore enfant. Hubert et Geneviève sont adultes, ont des enfants et des petits-enfants. Il écrit avoir essayé de se rapprocher d’eux, mais que leur mère les en a empêchés. Encore la version de Louis et il n’y en aura pas d’autres, simplement quelques indices çà et là.
Louis décrit d’autres personnages, certains trouvent grâce à ses yeux, à condition qu’ils ne lui ressemblent en rien.
Le style
L’écriture de François Mauriac, prix Nobel de littérature 1952, va droit au but, sans longues phrases interminables, mais chaque phrase est précise, tellement précise que le lecteur croit à l’histoire, comprend le malade (à défaut de l’approuver), ainsi que sa femme et ses enfants (sans toutefois les approuver non plus).
Incipit :
« Tu seras étonnée de découvrir cette lettre dans mon coffre, sur un paquet de titres. Il eût mieux valu peut-être la confier au notaire qui te l’aurait remise après ma mort, ou bien la ranger dans le tiroir de mon bureau, le premier que les enfants forceront avant que j’aie commencé d’être froid. »
Citations :
« Encore une fois, ce n’est pas pour cette injure que je la hais. Ils ne savent pas ce qu’est la vieillesse. Vous ne pouvez imaginer ce supplice : ne rien avoir eu de la vie et ne rien attendre de la mort. Qu’il n’y ait rien au-delà du monde, qu’il n’existe pas d’explication, que le mot de l’énigme ne nous soit jamais donné… »
« Oh ! ne crois surtout pas que je me fasse de moi une idée trop haute. Je connais mon cœur, ce nœud de vipères : étouffé sous elles, saturé de leur venin, il continue de battre au-dessous de ce grouillement. Ce nœud de vipères qu’il est impossible de dénouer d’un coup de couteau, d’un coup de glaive : “je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive”. »
Mon avis en résumé
Ce que j’ai aimé :
- Un roman psychologique (pas très loin du thriller)
- Une écriture précise
Mes notes
5/5 évidemment. Le nœud de vipères est un chef-d’œuvre.
Lecture un peu exigeante
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Connait-on vraiment son entourage ?
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Info-livre : Le nœud de vipères par François Mauriac
Editeur : LGF/Livre de Poche
ISBN : 2-253-00287-9
Pages : 190
Date de parution : 15/11/2006
(Le roman est paru pour la première fois en 1932)
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Je ne vois pas comment certains on put voir dans ce roman une recherche spirituelle. La lucidite, l’intelligence et la memoire de Louis sont extraordinaires. Son revirement vers la fin de sa confession me semble d’une logique implacable; bien qu’ils l’aient tous trahi, la fortune, le terroir restent l’element immuable qui doit rester en famille; Voila ce que sa confession lui suscite . En plus, ce qui ressort dans ce noeud de viperes, c’est que les sentiments de tous les personnages, trois generations, sont identiques, ils continuent tous a penser de la meme maniere que Louis, leur but est le meme, sauver le patrimoine. L’ironie que c’est que Louis a ellabore un travail qui en realite ne sert totalement a rien et il semblerait, que rien ne changera pour les generations futures.
Louis est un personnage qui a les pieds sur terre, mais qui finit par trouver ce qu’il ne pensait pas trouver. Certainement le livre de Mauriac que je préfère, pour ce fabuleux personnage.
Je ne me rappelais pas que ce roman était aussi fort.
Je l’ai trouvé encore plus fort à la relecture.