Les liens artificiels — Nathan Devers

Demi-plaisir et demi-déception pour le dernier livre de Nathan Devers, Les liens artificiels. Plaisir pour le côté iconoclaste de l’auteur qui glisse ça et là des remarques à couper le souffle, mais, déception pour l’intrigue et la narration que j’ai trouvées lourdes.

A l'arrière-plan, le haut de la Tour Eiffel, au premier plan, la couverture du livre de Nathan Devers, Les liens artificiels
L’avatar de Simon installera son appartement au troisième étage de la tour Eiffel

Que se passe-t-il ?

Le roman commence par le suicide en direct sur les réseaux sociaux de Julien Libérat, un début fort, vous en conviendrez, qui appelle une suite tout aussi intense. Hélas, le soufflé retombe rapidement et c’est bien dommage.

Bien sûr, j’ai retrouvé la facette facétieuse de l’écrivain que j’avais aimé dans Espace fumeur. Justifier l’anonymat sur les réseaux sociaux en s’appuyant sur La cité de Dieu de saint Augustin, franchement, je ne l’avais pas vu venir et ça, j’adore !

Pour le reste de l’histoire, je suis plus dubitative. À moins que je sois totalement insensible au thème abordé, jusqu’ici aucun roman qui aborde l’activité sur internet n’a trouvé grâce à mes yeux. Mais le sujet est-il aussi intéressant que ça ? L’électricité qui a tellement fait couler d’encre en son temps n’a pas, à ma connaissance, engendré de chef-d’œuvre littéraire. Il y a fort à parier que ce qui nous fascine et nous effraie aujourd’hui sera maîtrisé par tout le monde d’ici quelques générations. De même que l’électricité peut être utilisée pour tuer ou pour améliorer sa vie, l’humain intégrera qu’on peut faire le pire et le meilleur avec internet.

Autre reproche, la narration est un peu lourde : explications plus ou moins techniques au travers d’Adrien Sterner, suivies de l’histoire de Julien. Et je n’ai pas tout à fait compris le sens du titre, Les liens artificiels, tant le protagoniste semble être peu doué pour les liens, artificiels ou pas.

Où et quand ?

Le roman se déroule de nos jours, à moitié dans la réalité, à moitié dans le métavers créé par Adrien Sterner (cocorico, c’est un Français qui crée le premier métavers à succès). Mais j’avoue que ce métavers m’a paru une version améliorée de Second Life, version sans doute plus perverse.

Qui sont les personnages ?

#Julien Libérat
Looser ou raté dans la vraie vie et — pour une raison mystérieuse — star dans l’Antimonde, il représente ce qu’est capable de faire un être humain quand on le libère de toute contrainte et sous couvert d’anonymat.

Je ne me suis pas attachée au personnage que j’ai trouvé antipathique (forcément) et je n’ai pas vraiment été passionnée par ses actes.

#Adrien Sterner
Équivalent français de Mark Zuckerberg, génial et tyrannique, il crée un métavers avec une bonne dose de perversité.

#Serge Gainsbourg
Quel bonheur de retrouver cet artiste provocateur, animé par une intelligence artificielle qui utilise tout ce que le chanteur a dit ou écrit. Aller dialoguer avec Victor Hugo ou Michael Jackson, quelle bonne idée ce serait.

Le style

J’aime beaucoup le style de Nathan Devers. Il serait un peu plus au service de la narration et un peu moins une démonstration du talent de l’auteur, ce serait parfait.

Incipit :

« Le 7 novembre 2022, un nouveau compte fit son apparition sur Facebook, au nom de “Julien Libérat bis”. Comme on pouvait s’y attendre, cet événement suscita la plus parfaite indifférence. »

Citation :

 « De ces quartiers visités à mesure qu’ils exploraient le territoire de leurs oppositions : May qui n’en pouvait plus de sortir avec un mec laborieux et ric-rac, de devoir toujours composer avec son grand sérieux et ses petits moyens, de ceci et de cela, de cela et de ceci, de tout et surtout de rien, de cette double peine, les espoirs de changement et la résignation. Lui qui n’acceptait plus qu’elle le regarde de haut pour mieux le tirer vers le bas, qu’elle siphonne son énergie avec sa valse de reproches permanents et d’injonctions contradictoires, qu’elle le rende coupable de ses propres regrets, qu’elle lui fasse porter le poids immense de son imaginaire et l’étouffe au nom de tout cet air qu’elle souhaitait respirer. »

En résumé

Ce que j’ai aimé :

  • L’esprit iconoclaste de Nathan Devers
  • Le personnage de Serge Gainsbourg
  • Le style de l’auteur

Ce que j’ai regretté (mais peut-être pas vous) :

  • La narration lourde
  • Les réseaux sociaux peuvent être dangereux. Ah bon ? On s’en doutait un peu quand même.

Mes notes

Univers narratif3,5/5
Personnages3,0/5
Intrigue et narration3,0/5
Style5,0/5
Moyenne3,6/5

Sur les réseaux sociaux

Les recruteurs
Guillaume Dasquié

Tunis en arrière-plan et au premier plan, la couverture du livre de Guillaume Dasquié, Les recruteurs
« la chaleur de Tunis du mois de juillet pénètre jusqu’ici, »

Les enfants sont rois
Delphine de Vigan

A l'arrière-plan, un téléphone avec la flèche de Youtube, au premier plan couverture du livre de Delphine de Vigan, Les enfants sont rois
« Qu’est-ce qu’elle dit, maman, quand elle n’est pas contente ? »

Info-livre : Les liens artificiels par Nathan Devers

Couverture du livre de Nathan Devers, Les liens artificiels

Editeur : Albin Michel
ISBN : 978-2-226-47505-3
Pages : 336
Date de parution : 17/08/2022

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Catherine Perrin (cath_lit_et_chronique)
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Rédactrice NetGalley

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