Avant que j’oublie, publié en 2019, qui a reçu plusieurs prix (le prix du Livre Inter 2020, le prix Envoyé par la Poste 2019, le prix Summer 2020) et qui revient, l’air de rien dans les meilleures ventes du mois d’août 2020.

De quoi exciter ma curiosité
Un roman, vraiment ?
Le personnage principal, la narratrice et l’auteur s’appellent Anne Pauly, un roman oui, mais une autofiction, mélange entre fiction et autobiographie (autre représentante du genre : Annie Ernaux). Comme elle l’explique dans une interview réalisée à l’occasion des Correspondances de Manosque en 2019, dans Avant que j’oublie, elle a voulu parler du côté cocasse de la mort, porter la mémoire de son père, évoquer ses facettes contradictoires.
Le côté cocasse et obscène de la mort
Pendant qu’Anne est dévastée par le mort de son père, la vie continue, indifférente à ce qui vient de se passer. Entre chagrin et fou rire, Anne traverse les toutes les phases du décès d’un proche.
Tristesse
« J’ai regardé la boîte, les gens, la photo, la chorale, les bougies et c’est là que j’ai réalisé que je ne le verrai plus. J’ai mis deux mains devant ma bouche pour étouffer le sanglot qui s’emparait de moi et qui s’est bizarrement mué en un gémissement de loup ».
Burlesque
« Le fou rire nous a pris après l’homélie. Normalement, après son laïus, le prêtre s’assoit et garde le silence pendant quelques minutes, le temps que nous autres, pauvres pêcheurs, ayant le temps de réfléchir un peu sérieusement à tout ce qu’on a fait de travers, puis il reprend en disant : Acclamons la parole de Dieu. André, lui, s’est assis dans son fauteuil et a fermé les yeux. Au bout de cinq minutes, il n’avait toujours pas bougé. On commençait à s’inquiéter… C’est Eugénie qui a trouvé la solution en plaquant sur son clavier quelques accords agressifs. André a sursauté et s’est levé d’un bond… »
Porter la mémoire de son père
Un anonyme mort dans un hôpital anonyme.
« En réalité, j’angoissais énormément à l’idée qu’il n’y ait personne à cet enterrement et que nous soyons seulement six à constater que sa pauvre vie n’avait servi à rien et qu’elle n’avait marqué personne ».
La narratrice enquête pour comprendre qui était son père, je n’ai pas été convaincue par l’amie retrouvée qui envoie une lettre à Anne pour le lui expliquer.
Évoquer ses facettes contradictoires
Le père de la narratrice était violent, frappait sa femme, mais là, elle le considère néanmoins comme un homme aimant et cultivé.
La mère d’Anne n’apparaît qu’à peine comme en filigrane alors que tout le monde s’accorde à dire qu’elle était extraordinaire. Peu de lignes lui sont pourtant consacrées.
Le style
Incipit :
« Le soir où mon père est mort, on s’est retrouvés en voiture avec mon frère, parce qu’il faisait nuit, qu’il était presque vingt-trois heures et que passé le choc, après avoir bu le thé amer préparé par l’infirmière et avalé à contrecœur les morceaux de sucre qu’elle nous tendait pour qu’on tienne le coup, il n’y avait rien d’autre à faire que de rentrer. »
Avant que j’oublie est un monologue bien sûr, mais supprimer des négations pour donner davantage une impression d’oralité m’a parfois piqué les yeux. Anne Pauly abuse aussi des listes (lorsqu’elle vide la maison de son père).
Mon avis en résumé
Ce que vous allez aimer :
- La vie qui continue pendant qu’un deuil vous ravage.
- L’humour de l’auteur, tristesse et burlesque
Ce que vous regretterez (ou pas) :
- La difficulté à éprouver de l’empathie pour le père de la narratrice.
- J’aurais aimé en savoir plus sur Anne et sa mère.
Mes notes
Narration | 3,0/5 |
Thème | 4,0/5 |
Style | 3,0/5 |
Moyenne | 3,3/5 |
Info-livre Avant que j’oublie par Anne Pauly

Editeur : Verdier Editions
ISBN : 978-2-37856-029-4
Pages : 137
Date de parution : 22/08/2019